23 Oct 2013

Que doit-on attendre de la brillante présentation de Matata Ponyo au Chicago Council on Global Affairs?


En date du le 9 octobre 2013 a l’occasion du 9ème Forum Bisannuel ‘US-Africa Business Summit’ tenu à Chicago, le Premier Ministre Congolais (RDC) Mr. Matata Ponyo a présenté au ‘Corporate Council on Africa’ un portrait Congolais très diffèrent de l’image que la plupart des investisseurs Américains se font du Congo. Cette image a probablement agréablement surpris l’audience, a ravi les Congolais et a apporté une note positive sur l’actualité du pays. Mais que peut ont vraiment attendre de ce discours ?

Je pense que le Premier Ministre a préparé un puissant discours médiatique, mais pour une audience avisée, ce discours risque de ne pas attirer l’investissement escompté puisqu’il manque certains aspects substantiels importants pour créer la confiance nécessaire au sein des groupes d’investisseurs. Le discours lui-même s’est articulé sur cinq points principaux, à savoir la Sécurité des biens et des personnes (en rapport avec la guerre au sud du Nord Kivu), la gouvernance dans le domaine des ressources naturelles, l’énergie, la sécurité juridique des investisseurs économiques et les améliorations dans le secteur du transport.

Avant de critiquer le contenu du discours, je tiens à préciser que je soutiens les efforts du Gouvernement sous le leadership de son chef, Monsieur Matata Ponyo (et non Monsieur Kabila, je souligne !) mais je reste quelque peu sceptique quant aux attentes qu'il a pretendument suscité chez certains de mes compatriotes que j’estime un peu trop optimistes (cet article et celui-ci sont quelques exemples) . Le climat des affaires ne se construits pas par des discours. Les discours, pour présenter un climat d’affaire attrayant pour les investisseurs étrangers, doivent suivre des réalisations concrètes sur terrain et non pas les précéder. Parler des reformes est une bien bonne chose, mais la plus part de ces réformes ont déjà eu lieu avant le Gouvernement Matata et certaines réformes sont encore en voie d’être finalisées. C’est donc un effet de « déjà vu » plutôt qu’une surprise agréable que ces mots on suscité. Les investisseurs ont besoin d'exemples d'autres investisseurs qui ont reussit au COngo avant de se lancer.

S’agissant des reformes sécuritaires, il parle des accords d’Adis Abeba. Dans ces accords le Gouvernement prend plusieurs engagement mais n’en initie finalement que très peu. L’armée reste une institution prédatrice qui consomme beaucoup et rend très peu service à la nation qu’elle est sensée défendre. La même chose vaut pour les reformes en matière de sécurisation juridique. Plusieurs accords ratifiés mais très peu de mécanisme de mise en œuvre au niveau local.
Le manque de réalisation des engagements pris reste aussi à déplorer en matière de gouvernance. Avec le scandale Getler et les publications de l’EITI, un doute persiste sur la situation réelle de la transparence dans le secteur minier. Un récent rapport indique que seuls 15% des minerais congolais passent par les voies officielles. (Je critique la conférence sur la transparence minière tenue à Lubumbashi en Janvier 2013 dans un article précèdent)Nomer des exemples positifs concrets d'investisseurs industriels Nord Americains operant a l'est du Congo tels Banro et Tenke Fungurume aurait eu un plus grand impact.

Les défis énergétiques sont énormes, il le reconnait, et il brosse une liste des programmes mis en œuvre pour palier a cette carence. Ici au moins les projets nommés sont réels. Il aurait cependant du souligner que le secteur de l’énergie lui-même a récemment été libéralisé et que l’investissement privé est le bien venus. Avec des investisseurs Americains dans la région, tels que Symbion a Kigoma/Tanzanie, les possibilités de partenariat privé-publique dans la distribution de ces services s’ouvrent. . Je déplore aussi qu’il n’ait pas souligné le potentiel qui existe à lier les projets des infrastructures tels que l’énergie (Ruzizi) et le transport (Via le Rwanda et l’Uganda) à la paix et la stabilisation du Kivu. Une inventive dont les 3 pays bénéficieraient bien.

Une avancée réelle dans le domaine des infrastructures est la réouverture des axes nationaux et le balisage des fleuves et des rivières dans leurs parties navigables. Ceci s’aligne parfaitement aux efforts de développement du secteur agricole. Cependant ces infrastructures restent toutes tournées vers Kinshasa et ne sont pas liées aux axes internationaux. Un exemple simple serait la liaison des routées nationales 2 et 5 au port de Kalundu (Uvira/Sud Kivu) qui lui-même serait développé pour accueillir toutes les cargaisons Congolaises du port de Dar Es Saalam. (Solutions que j'explore dans cet article)

Ce discours est un premier pas, et pourrait être considéré comme un premier brouillon nécessitant plusieurs mises à jour avant d’en arriver au document final. Il reste néanmoins le premier brouillon depuis plusieurs décennies et il redonne espoir. On sent une volonté réelle du chef du gouvernement Congolais a réinstaurer les piliers nécessaires au développement durable, basé non pas sur l’aide (que je condamne ici) mais sur les rapports dignifiant des partenariats économiques d’égal a égal. La meilleure façon d’attirer l’investissement étranger reste à mon avis le renforcement et la promotion l’investissement local. Si les opérateurs locaux en arrivent à opérer dans un environnement saint, les opérateurs internationaux le verront, et seulement alors un discours charmeur pourrait les encourager à investir gros au Congo.

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