23 Jan 2013

Malédiction des ressources/malédiction de l’aide?



La malédiction des ressources est le paradoxe par lequel un pays aux ressources naturelles abondantes expérimente une pauvreté extrême et/ou se retrouve dirigée par un gouvernement autoritaire (ma propre définition dérivée de la littérature abondante sur le sujet). Cette malédiction entraine souvent des conflits armés. Je pense que le Congo est un pays qui présente des éléments réels de la malédiction des ressources. Au-delà de cette malédiction, je pose aussi la question de la malédiction de l’aide : dans quelle mesure l’aide au Congo contribue aux mêmes éléments que ceux de la malédiction des ressources ? Je remets en question les bénéfices des actions dites humanitaires au Congo.



A. La malédiction des ressources

D’abord examinons les éléments de la malédiction des ressources au Congo :

1. Des ressources minières abondantes : Tout le monde parle du Congo comme d’un « scandale géologique ». En effet, le Congo figure en très bonne position parmi les pays ayant le plus de réserves en Coltan, or, cassitérite, diamants, forets, rivières, gaz, pétrole etc. Le Congo ne figure malheureusement pas sur la liste des plus grands producteurs de ces commodités. Au contraire, le Congo a connu plusieurs conflits armés autour du contrôle des ressources.

2. Une pauvreté prononcée : d’après les données de 2010, La population Congolaise estimée à 67,8 millions d’habitants, vit avec un PIB de 13,1 milliards par an, soit 350 dollars par habitant par an, faisant de ce fait du Congolais moyen un homme pauvre (le seuil de pauvreté étant de moins d’un dollars par jour). En fait, le Congolais moyen est l’homme le plus pauvre au monde, suivis de près par son voisin Burundais (420 dol par an).

Les indices de développement humains ne sont pas fameux : Le taux de mortalité au Congo est de 15,9/1000 (troisième taux le plus élevé au monde après l’Ukraine et la Guinée Bissau). Il a aussi une mortalité infantile de 109,5 (quatrième taux le plus élevé après l’Afghanistan, le Tchad et la Guinée Bissau). L’espérance de vie du congolais estimée a 48,9 est la troisième la plus basse après la Siéra Leone (48,2) et la Guinée Bissau (48,8). L’Esperance de vie masculine est la pire au monde, a seulement 47,3 ans.

L’inflation y est estimée à 17,3 par an. Nous somme parmi les dix pays ou la malaria et la tuberculose tuent le plus. L’un des dix pays ou le vaccin contre la rougeole et autres maladies infantile est le moins administré. Le seul pays ou les vaccins ne sont pas pris en charge par le gouvernement !

3. Des problèmes sévères de gouvernance : Un gouvernement totalitaire ou une petite élite profite corruption (Au Congo, les investisseurs rencontrent les mêmes personnes de jour pour le compte du gouvernement et de nuit pour le compte des partenaires locaux), un manque criant de transparence et de recevabilité (les crimes de corruption ne sont même pas répertoriés), un gouvernement inscrit aux abonnés absents (Le gouvernement congolais n’a consacré que 2.5 de son budget a la sante en 2010. Ce taux a chuté à 2% en 2011).

Manque total de démocratie : Sur une échelle démocratique de 1 à 10, avec 10 pour le plus grand niveau de démocratie, le Congo a marqué 2.15 en 2010 (treizième venant du bas). Notons pour information que les USA, la France et les Royaumes Unis ne figurent pas sur la liste des quinze pays les plus démocratiques du monde. Ceux-ci sont essentiellement les pays scandinaves.

Nous somme le pays le plus corrompu du monde avec 2/10 (10/10 étant le moins corrompu). Notre bureaucratie décourage les investissements. Aucune des 15 plus grandes banques au monde n’opère au Congo. Il prendrait 1 jour pour commencer un commerce en Nouvelle Zélande, 3 jours au Rwanda, 5 jours au Sénégal et … 160 jours au Congo.

4. Conflits armes : Non seulement notre indicateur est de 3, 073 (somalie-3.392, afganistan-3.525, Soudan 3.193 et Irak 3,192), notre budget national de défense reste parmi les plus faible au monde(en pourcentage au PIB comme en valeur nominale), présageant une armée et une sécurité très faible encore pour longtemps.

B. La malédiction de l’aide ?
Apres avoir établi sans trop de peine que le Congo vit ce que d’aucuns appellent la malédiction des ressources, je voudrais maintenant poser la question de l’aide. En fait je pense de plus en plus que l’aide aux gouvernements africains à peu près le même effet que les revenus des ressources naturelles. Dans ce paragraphe je vais essayer de mettre un lien entre chacun des éléments constitutifs de la malédiction des ressources et l’aide.

D’abord définissions l’aide. Telle que définie par Dambisa Moyo, l’aide est l’ensemble des prêts concessionnels et dons qu’un pays reçois de l’étranger en terme d’assistance au développement. D’après cette définition, l’argent que l’ONU apporte au Congo, pour la sécurité ou pour les agences, l’argent reçu du FMI ou de la Banque Mondiale, de la Banque Africaine pour le Développent (BAD), l’aide bilatérales et autres soutiens du même genre sont ce que nous appelons « aide » dans le cadre de cet article.

1. Une aide abondante : le Congo est le troisième récipient de l’aide multilatérale et multilatérale. Il a reçu 3,529 milliards, do t 1 milliard pour les forces de la Monusco. Il reste à déplorer que cette aide ne renforcent pas prioritairement les capacités de gouvernance qui ont si souvent été cités comme les vrais problèmes, mais sont plutôt canalises à remplacer les services publiques comme l’éducation et la santé. Ceci participe à fragiliser la recevabilité de l’Etat et positionne a tors la société civile comme une alternative au gouvernement.

L’aide inscrit le Gouvernement aux abonnés absents. Comment sinon expliquer que plus de trois quart du budget de la sante est prise en charge par les ONG ? Force néanmoins est de reconnaitre que sans certaines de ces ONG (ou des ONG qui travaillent mieux que ça) la situation serait catastrophique sur le terrain.

2. Une situation inchangée pour les plus pauvres et ou les employés des ONG semble être les seuls à réellement se développer au niveau humain. Pour exemple, le plus grand nombre des employés des Nations Unis travaillent à créer et gérer des situations qui n’existeraient pas sans leurs missions. Je ne mentionne pas leurs exemptions fiscales qui constituent un manque à gagner de plusieurs millions de dollars par an pour l‘Etat Congolais. Les modes de vies contrastes entre les employés locaux ou expatriés des ONG et les populations qu’ils sont sensés aider sont tout simplement révoltants.



3. Des problèmes sévères de gouvernance : la plupart des ONG ignorent la participation qu’ils prêchent et utilisent des méthodes préfabriquées, avec quelque fois des employés incompétents ou inexpérimentés pour implémenter des projets qui ont marche ailleurs, il y a plusieurs années. Ces formules copier-coller ne sont pas toujours les plus appropriées, mais la procédure d’adoption des projets est souvent trop éloignée de la base pour opérer des adaptations qui s’imposent.

La corruption (surtout dans les départements logistique, ressources humaines et lors de la sélections des projets à financer/bénéficiaires) existent dans le monde des ONG mais puisqu’ils impliquent directement la société civile ils ne sont pas toujours dénoncés Il y a aussi à décrier un manque total de recevabilités vis-à-vis de la population bénéficiaire et parfois même vis-à-vis des bailleurs.


Faut-ils se débarrasser des ONG ? Je ne pense pas. Cette question fera l’objet d’un article à venir. Je voudrais simplement ouvrir les yeux des millions des personnes de bonne volonté et d’humanitaires authentiques sur la situation que l’aide mal canalisée entraine et perpétue au Congo. Je rappelle que certaines ONG œuvrent réellement pour le bénéfice des plus pauvres, mais l’authenticité de leurs sentiments altruistes ne peux à elle seule briser ce que j’appelle ici la malédiction de l’aide.

No comments:

Post a Comment